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Municipal

Les pouvoirs de visite de l’inspecteur municipal

  • Annie Aubé
Par Annie Aubé Associée
Un inspecteur municipal peut être autorisé par la loi ou la règlementation à visiter une propriété dans le cadre de ses fonctions. Qu’en est-il toutefois si le propriétaire refuse de le laisser entrer chez lui?

La Cour d’appel s’est prononcée sur cette question le 17 septembre 2018, dans le cadre d’un litige opposant les propriétaires d’un complexe résidentiel à la Ville de Sainte-Agathe-des-Monts1.

En 2012, la Ville dépose à la Cour supérieure une requête pour ordonnance visant la démolition de sept des onze bâtiments des propriétaires en raison de leur état de vétusté. Trois ans plus tard, en vue de l’audition de la demande, la Ville avise les propriétaires qu’elle souhaite inspecter à nouveau les bâtiments, mais ces derniers s’y opposent.

Malgré ce refus, les inspecteurs de la Ville et les inspecteurs du service de sécurité incendie procèdent à l’inspection, accompagnés d’un ingénieur en bâtiment. Afin de pénétrer à l’intérieur des bâtiments, ils font appel aux services d’un serrurier pour ouvrir les portes de certains bâtiments et entrent par la fenêtre pour déverrouiller de l’intérieur deux autres bâtiments.

Les rapports rédigés à la suite de cette visite sont déposés devant la Cour supérieure qui accueille le recours de la Ville et ordonne aux propriétaires de réparer leurs bâtiments, à défaut de quoi la Ville est autorisée à procéder à leur démolition.

En appel, les propriétaires contestent l’admissibilité en preuve de ces rapports au motif que l’inspection a été faite en contravention à leurs droits fondamentaux protégés par les articles 24.1 de la Charte des droits et libertés de la personne2 et 8 de la Charte canadienne des droits et libertés3.

La Ville soutient quant à elle que l’article 3.1.3(3) du Règlement sur l’application et l’administration des règlements d’urbanisme numéro 2009-U51 autorise ses inspecteurs à visiter et à examiner, entre 7h00 et 19h00, toute propriété mobilière ou immobilière ainsi que l’intérieur ou l’extérieur de tout bâtiment afin de vérifier si les dispositions du règlement sont respectées.

La Cour d’appel considère que le règlement décrète une obligation pour les propriétaires, les occupants ou les locataires de permettre l’inspection d’un bâtiment, et à défaut, une amende peut être imposée4. Il ne confère toutefois pas expressément aux inspecteurs municipaux le pouvoir d’entrer dans une maison d’habitation de force, sans autorisation préalable. De plus, rien dans le texte de l’article 411 de la Loi sur les cités et villes5 ne permet aux inspecteurs de procéder d’une telle manière.

Par conséquent, la Cour d’appel mentionne que l’inspection a plutôt été effectuée afin de permettre à la Ville de mettre à jour sa preuve dans le cadre d’un dossier judiciarisé, ce qui n’était pas l’objet de la loi ni de la réglementation municipale. Dans un tel cas, ce sont les règles du Code de procédure civile6 qui trouvent application.

Bien que la Cour déclare que l’inspection effectuée par la Ville était illégale, elle conclut que les rapports d’inspection étaient admissibles en preuve. Reconnaissant l’importance du contexte, la Cour retient d’une part que les bâtiments sont dans un état lamentable et vétuste depuis plusieurs années et, d’autre part, que l’atteinte à la vie privée des propriétaires, qui n’habitent pas les lieux, est de moindre importance. Pour ces motifs, l’utilisation des rapports ne déconsidère pas l’administration de la justice.

Cet arrêt rappelle aux municipalités que leurs inspecteurs ne peuvent procéder de force à l’inspection des bâtiments et qu’en cas de refus du propriétaire, l’obtention préalable d’une autorisation judiciaire est requise.


1 Amzallag c. Ville de Sainte-Agathe-des-Monts, 2018 QCCA 1439.

2 Charte des droits et libertés de la personne, RLRQ, c. C-12.

3 Loi constitutionnelle de 1982, Annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R-U), 1982, c. 11.

4 Amzallag c. Ville de Sainte-Agathe-des-Monts, supra note 1, par. 29.

5 Loi sur les cités et villes, RLRQ, c. C-19.

6 Code de procédure civile, RLRQ, c. C-25.01.

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